À Sanaa, la capitale du Yémen,
de nombreux bâtiments ont été détruits
par les raids aériens
Cette guerre, qui oppose depuis l'été 2014 la rebéllion chiite «houthie» au gouvernement du président Abd-Rabbo Mansour Hadi, soutenu par une coalition militaire menée par l'Arabie Saoudite, a fait des dizaines de milliers de morts et plus de trois millions de déplacés, selon différentes agences de l'ONU.
Pour comprendre les origines du conflit, il faut remonter quelques décennies en arrière. Le Yémen ne s'est unifié qu'en 1990, après avoir été divisé, pendant la Guerre froide, entre une «République démocratique populaire», d'obédience socialiste, au Sud, et une «République arabe», au Nord. Après la réunification, l'État central a eu d'autant plus de mal à s'imposer que de nombreuses tensions communautaires existaient déjà à l'intérieur même des deux blocs.
- UN PAYS JEUNE ET INSTABLE
En 2004, les houthis, estimant être mis à l'écart de la vie politique et économique du pays, déclenchent d'importantes manifestations à Saada, dans le nord. Les contestataires sont durement réprimés. Hussein Badreddine al-Houthi est tué par les autorités. Mais l'insurrection perdure, et les houthis s'emparent peu à peu de plusieurs territoires montagneux du nord du pays, avant de s'étendre le long de la frontière saoudienne.
C'est alors qu'interviennent les «Printemps arabes». Dans le sillon des mouvements de révoltes survenus en Tunisie et en Égypte, des Yéménites de tout bord se rebellent contre le président Ali Abdallah Saleh, au pouvoir depuis plus de 30 ans (il dirigeait déjà le Yémen du Nord avant la réunification). Le dirigeant, contre lequel se sont longtemps battus les houthis, accepte en 2012 de céder le pouvoir à son vice-président, Abd-Rabbo Mansour Hadi.
Mais le nouveau découpage fédéral proposé à l'issue de ce «printemps yéménite» ne convient pas aux insurgés chiites. Ils revendiquent une région qui leur soit propre, dotée d'un accès à la mer. En 2014, les houthis reprennent donc leur insurection et entrent dans la capitale, Sanaa.
- L'INTERNATIONALISATION DU CONFLIT
Cette thèse d'une guerre indirecte entre Riyad et Téhéran sur le territoire yéménite est avancée par de nombreux observateurs. Toutefois, si l’appartenance des houthistes à une galaxie pro-iranienne (...) ne fait guère de doute, les ressorts de la guerre au Yémen ne peuvent être réduits à cette dimension régionale et à la rivalité entre sunnisme et chiisme.
- DES BELLIGÉRANTS «ANNEXES»
Et al-Qaida n'est pas le seul groupe jihadiste à sévir dans le pays. Depuis la fin de l'année 2014, le Yémen a également vu s'implanter Daesh, qui commet régulièrement des attentats. Le 24 février dernier, une double attaque-suicide revendiquée par le groupe terroriste a ainsi fait 12 morts à Aden.
Enfin, en plus des houthis et des différentes factions jihadistes, le pouvoir yéménite est contesté par une entité séparatiste, dans le sud du pays. Si celle-ci a, dans un premier temps, soutenu l'État central contre les insurgés chiites, elle affirme désormais ses ambitions indépendantistes. Depuis la fin du mois de janvier 2018, c'est le mouvement sudiste qui contrôle Aden. Le président Abd-Rabbo Mansour Hadi, exilé en Arabie saoudite, dénonce un coup de force.
- FAMINE ET CHOLÉRA FRAPPENT LE PAYS
La guerre a aggravé la situation, jusqu'à un stade catastrophique. Les belligérants entravent l'aide humanitaire, alors que près de la moitié des 27 millions d'habitants de ce pays, très dépendant de l'importation, sont menacés de famine. Les destructions subies par le système sanitaire, dans une région qui manque déjà d'accès à l'eau, ont en outre déclenché une épidémie de choléra, qui a touché près d'un million de personnes en 2017. Plus de 2 000 en sont mortes.
Les victimes de la faim, des maladies et de la misère n'entrent pas dans le décompte des morts causées par la guerre. Elles sont pourtant en lien direct avec celle-ci, au point que plusieurs ONG accusent les différentes parties d'entretenir et d'instrumentaliser cette catastrophe humanitaire.
- LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE ENTRE SILENCE ET VENTES D'ARMES
Au contraire. En avril 2019, le nouveau média d'investigation Disclose a révélé la présence d'armes françaises au Yémen, alors qu'elles avaient été vendues à l'Arabie Saoudite ou aux Émirats arabes unis. Les preuves, comme des photos ou des vidéos, contredisent alors la version officielle du gouvernement, qui assurait que ces armes ne serviraient qu'à la défense intérieure de l'Arabie Saoudite.