Caillou de 10 kilomètres carrés jeté dans la mer Tyrrhénienne, entre la Corse et l'Italie où vivent des centaines de milliers de rats. "Un au mètre carré", s'alarme la région Toscane, propriétaire de Montecristo. Une situation d'autant plus inexplicable que l'île, élevée au rang de réserve naturelle, est l'une des terres les plus protégées d'Italie.
La pêche, la navigation et la baignade y sont interdites dans un rayon d'un kilomètre autour de ses côtes. La visite de l'île est strictement réglementée, et réservée à 1 000 personnes par an, qui auront pris soin de demander l'autorisation avec... trois ans d'avance. Et qui ne pourront accoster qu'à un endroit précis de l'île, en arrivant "perpendiculairement" à la côte... Priorité est donnée aux équipes de scientifiques ou aux associations de défense de l'environnement. Qui, elles-mêmes, une fois sur l'île, sont tenues de ne pas s'écarter des quelques sentiers existants.
Vingt-six tonnes d'appâts empoisonnés
Des mesures de protection extrêmes qui n'auront donc pas permis d'éviter l'invasion de l'île par les rats. Des rats, qui, plus incroyable encore, ne sont pas une espèce endogène de Montecristo. Les pouvoirs publics italiens, associés à l'Union européenne, ont donc décidé de réagir et préparent une véritable guerre contre les rongeurs. À la fin du mois de janvier, vingt-six tonnes d'appâts empoisonnés doivent être larguées sur Montecristo. Une méthode qui suscite une vague d'indignation en Italie. Et pas seulement parmi les écologistes traditionnels. Un ancien champion du monde de pêche subaquatique, Carlo Gasparri, a pris la tête du mouvement de contestation. "Le produit qui sera utilisé est hautement toxique pour les organismes sous-marins et peut provoquer à long terme des effets négatifs pour l'environnement", s'est-il alarmé.
"Personne ne veut empoisonner l'île", lui a répondu la directrice du parc national de l'archipel toscan, Franca Zanichelli. Qui rappelle que le procédé a déjà été utilisé sur le minuscule îlot de Giannutri, situé à quelques encablures de Montecristo, apparemment avec succès. Reste à savoir comment les rats peuvent apparaître miraculeusement sur ces îles presque coupées du monde. D'autant que le problème ne date pas d'hier. Au Ve siècle de notre ère, le poète Rutilio Namazio racontait une "légende" selon laquelle l'îlot de Giannutri avait été vidé de ses habitants par... une invasion de rats.