Deux Britanniques ont été exposés, samedi 30 juin, au même agent innervant, le Novitchok, qu'un ancien agent double russe en mars dernier. Une substance mal connue aux effets ravageurs.
Quatre mois après l'empoisonnement de l'ex-espion russe Sergueï Skripal et sa fille, le poison Novitchok a fait deux nouvelles victimes au Royaume-Uni. Deux britanniques ont été exposés samedi 30 juin à Amesbury, une petite ville située à une douzaine de kilomètres de Salisbury, où habitait l'ancien agent russe. Si la thèse d'un accident liée à la drogue a d'abord été envisagée, la police a finalement reconnu dans la soirée du mercredi 4 juillet qu'il s'agissait du Novitchok. Une arme chimique redoutable, élaborée dans les années 1930.
Ces substances ont en effet été synthétisées pour la première fois par l'Allemagne nazie, dans le cadre de recherches sur les insecticides. Les soviétiques, eux, sont parvenus à le concevoir aux années 1970-1980. Une époque où la guerre froide battait son plein et où le régime souhaitait se procurer ces substances hautement toxiques aux effets parfois très rapides. Et pour cause : ces agents pénètrent l'organisme par inhalation ou à travers la peau. Ils s'attaquent à une enzyme cruciale pour le fonctionnement du système nerveux, l'acétylcholinestérase. Parmi les symptômes, on constate une diminution du diamètre des pupilles, des nausées, une incontinence, des tremblements, des convulsions et des difficultés respiratoires.
Un policier le 5 juillet 2018 à Salisbury
où deux personnes ont été empoisonnées.
"Les premiers symptômes surviennent 20 à 30 minutes après l'exposition initiale"
La rapidité d'action, elle, dépend du mode d'administration. Une inhalation à forte dose peut provoquer la mort en quelques minutes. Le processus est plus long si l'agent pénètre dans le corps non pas via le système respiratoire mais via la peau. Dans ce cas, "les premiers symptômes surviennent 20 à 30 minutes après l'exposition initiale et ensuite, le processus d'empoisonnement peut être rapide si la dose est élevée", relève l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC). Dans des conditions normales, les agents innervants se présentent sous forme liquide, plus ou moins fluide.
Si le terme Novitchok est peu connu du grand public, certains agents innervants sont en revanche plus connus. Par exemple le sarin et le VX.. Le premier a été utilisé à plusieurs reprises en Syrie depuis 2013, et dans un attentat dans le métro de Tokyo en 1995. Le second a servi à assassiner le demi-frère du dirigeant nord-coréen Kim Jong-un en février 2017.
Selon les experts, la procédure de soins classique dans le cas d'un empoisonnement avec un agent innervant est de stabiliser les fonctions vitales du corps (respiration, battements du cœur). Parallèlement, il faut administrer au patient de l'atropine, médicament de base utilisé pour combattre les symptômes des agents innervants. Celle-ci bloque les récepteurs de l'acétylcholine pour empêcher son accumulation dans le système nerveux. Le temps, si le traitement fonctionne, de permettre au corps d'évacuer l'agent innervant et de produire à nouveau l'enzyme qu'il ciblait.