Les frégates du Pacifique étaient déjà réputées pour leur capacité à voler des semaines sans se poser. Une étude télémétrique de leur trajectoire et stratégie de vol vient de révéler qu'elles peuvent rester dans les airs durant plus de deux mois lors de leurs migrations transocéaniques. Fin stratèges, elles profitent des conditions atmosphériques rencontrées dans les eaux tropicales (les alizés et les courants d'air ascendants au niveau des nuages) pour voler et planer sur des milliers de kilomètres, en minimisant les battements d'ailes et donc leur dépense d'énergie.
Le mâle adulte a le plumage noir. Il a une poche gulaire rouge vif sur la gorge. Sur le dos et les scapulaires, on peut voir des plumes noires aux reflets |
Oiseau marin énigmatique car difficilement observable, la frégate du Pacifique (Fregata minor) est très légère et dotée d'ailes très longues et très larges, ce qui lui confère une capacité exceptionnelle à planer et monter dans les courants d'air ascendants sans battre des ailes. Avec la période d'élevage des jeunes la plus longue de tous les oiseaux et son incapacité à se poser sur l'eau (alors qu'elle dépend entièrement de poissons volants qu'elle doit capturer en vol).
Les frégates effectuent leurs vols transocéaniques entre l'Afrique et l'Indonésie en suivant le bord de la zone de formation des cyclones tropicaux autour de l'équateur, souvent appelée pot-au-noir par les marins. Elles utilisent des vents favorables (les alizés) pour effectuer sans effort d'immenses cercles dans l'océan Indien. Les juvéniles en particulier, qui quittent pour la première fois leur lieu de naissance, parcourent des milliers de kilomètres et, encore plus étonnant, peuvent rester en vol pendant plus de deux mois, sans se poser.
La femelle a la poitrine blanche et la gorge grise. Elle n'a pas la poche gulaire rouge vif sur la gorge. Elle est plus grande que le mâle. |
Au sein de ces trajectoires circulaires, à plus petite échelle, les études révèlent que les frégates volent en montagnes russes. S'aidant de la convection sous les cumulus, elles montent en altitude en planant sans battre des ailes et en dépensant très peu d'énergie. Les enregistrements montrent alors de courtes périodes d'inactivité totale, suggérant que les frégates dormiraient quelques minutes pendant cette phase d'ascension. Arrivées au bas des cumulus, à 600 ou 700 mètres d'altitude, elles descendent en vol plané sur des kilomètres, sans dépense d'énergie. Dans les zones moins nuageuses, pour planer sur de plus longues distances, les frégates peuvent monter régulièrement à de très hautes altitudes (de 3000 à 4000 mètres) en entrant à l'intérieur des cumulus où elles bénéficient de puissants courants ascendants. Mais elles y rencontrent également des températures négatives auxquelles leur plumage dépourvu de duvet n'est pas adapté.
Cette étude pose de nombreuses questions sur la capacité des frégates à dormir en vol, à résister aux conditions extrêmes rencontrées à l'intérieur des cumulus mais aussi sur la stratégie qu'elles emploient pour éviter les cyclones tropicaux sur leur trajectoire.