Pas un papier administratif qui ne soit délivré sans la sacro-sainte bénédiction du moqadem ! Du certificat de résidence au certificat de vie, individuelle ou collective ! Ne parlons pas du certificat d’indigence qui permet aux plus démunis d’entre les citoyens de profiter des miettes d’une hypothétique aide publique ou caritative ! Même le passeport, document important, dont la délivrance définitive donne lieu à une enquête des services de police ou parfois même de la DST, nécessite comme premier document requis le fameux bout de papier portant la signature du moqadem.
Tout comme les autorisations de construire ! Et j’en passe…. Auxiliaire du caïd, qui est le représentant du Wali, donc de l’état, sur le terrain et face à la population, le moquadem se présente en fait comme le symbole du pouvoir face au citoyen. Plus présent que la police ou la gendarmerie, sans en avoir les pouvoirs, plus présent que la justice sans en avoir l’indépendance supposée, le moqadem n’a pas pour mission d’assurer ou de participer à la sécurité de sa circonscription, ni de régler les ligites survenus entre les habitants.
Le professeur de sociologie Majid Dkhissy, enseignant à l’Université Hassan II de Casablanca, est l’un des rares à aborder ce sujet : «Les Moqadems ne sont pas seulement une sous-catégorie d’agents d’autorité dont le pouvoir a fait ses yeux et ses oreilles et dont il justifie les dérives par la précarité de leur statut. » Et cet universitaire n’exprime pourtant pas l’avis ni même l’espoir de voir la disparition prochaine de ce chaînon qui lui semble indispensable dans le mode de gouvernance marocain : « Les Moqadems nous intéressent par leur dimension symbolique : ils constituent le rouage élémentaire de notre système de gouvernement, basé sur une soumission institutionnalisée. »
Et pourtant, il serait aisé d’imaginer une administration locale sans moqadem avec juste :
• des agents d’autorité responsables, compétents, intègres, des agents administratifs bien formés, des dossiers bien rangés.
La véritable réforme serait celle-là, celle qui touche chacun de nous dans sa vie quotidienne la plus basique.