En fauteuil roulant, le président algérien a fini par apparaitre en public, accompagné de son petit-fils. Il est allé voter, pour lui, comme le feront beaucoup d’Algériens qui voteront pas pour Boutef, mais qui voteront pour ne pas avoir autre chose que Boutef. Pas parce qu’ils tiennent à lui. Mais parce que l’inconnu n’est plus gérable. Quitte à enterrer les rêves de sa jeunesse.
Depuis les années 90, l’irruption du FIS (Front islamique du salut) sur la scène politique, sa victoire aux élections législatives et les années de sang de répression et de guerre civile qui ont suivi, tout a changé. Pour deux générations d’Algériens, l’inconnu n’est pas synonyme d’avenir ou d’espoir, il est synonyme de peur et d’angoisse. Tout plutôt que de prendre le risque de revivre ce cauchemar. Alors oui, plutôt Boutef qu’autre chose.
De fait, Bouteflika a permis à l’Algérie de retrouver un pouvoir tenu par les civils et non plus par les militaires. Le pays s’est stabilisé. Le problème, c’est que la stabilité, lorsqu’elle dure, devient immobilisme. Que l’immobilisme, à la longue, devient sclérose. Et que la sclérose tue. Ou rend fou. Ca dépend de l’âge.
En Algérie, 50% de la population a moins de 30 ans. C’est la folie qui la guette. La folie de ne rien pouvoir rêver, entreprendre, croire. La folie de celui qui voit sur Internet le monde changer partout autour de lui et qui a l’impression de vivre encore dans le pays de ses parents quand ils avaient 20 ans.
L'Algérie avec une économie centralisée, étatisée, qui à part la rente gazière n’arrive à rien développer. Des mentalités qui ont du mal à bouger. Une Algérie qui n’a pas bougé depuis les années 60, quand Bouteflika avait 26 ans, qui était le plus jeune ministre des Affaires étrangères à représenter son pays à l’ONU. Aujourd’hui l’Algérie, un pays de vieux peuplé par des jeunes.
Ce pays, ce pouvoir, Bouteflika l’incarne. Physiquement. Il sait qu’il doit passer la main. Comment ? À qui ? La question ne cesse de se poser. On dit qu’il consulte en ce moment. Des proches, de vieux amis, des années d’espérance, parmi lesquels des diplomates qui ont sillonné le monde, vu les révolutions du printemps arabe de près. Il leur parle avec une idée fixe. Comment faire pour éviter un scenario à l’Égytienne ?
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