Dakhla, bout du monde marocain
Villa Cisneros, comme la nommèrent les colons espagnols dans la région en 1884, fut façonnée par les sables du temps, les vents, les eaux et le soleil. L’alchimie naturelle de Dakhla désoriente. Ainsi, posons ensemble quelques repères.
La ville de Dakhla se situe à 30 km au nord du tropique du Cancer, sous les mêmes latitudes que La Havane, Canton ou Hawaï, à 650 km au sud de Laâyoune, à 1 690 km de Rabat et à seulement 370 km au nord de la frontière mauritanienne.
Entre le continent et la péninsule, la baie s’allonge sur 37 km et couvre une superficie de 400 km2. À Dakhla, les espaces terrestres et aquatiques sont aujourd’hui doublement reconnus par les conventions internationales RAMSAR et ZICO, respectivement sur la protection des zones humides et des oiseaux.
Un territoire de passage convoité au Sahara
Les premiers habitants de Dakhla furent d’humbles pécheurs, jusqu’au 14e siècle. Leur terre était désertique, presque vierge. Ici nomadisaient les tribus sahraouies de la région.
Les premiers colons furent espagnols. 1504 : le pape leur attribue la colonie. 1884 : ils entamèrent la construction de la ville, Villa Cisneros, bâtirent une église, créèrent une colonie, exploitèrent les ressources halieutiques. L’Aéropostale française y installa une base en 1925, créant une étape entre Casablanca et Dakar.
L’Espagne se retira du Sahara occidental, où se trouve Dakhla, en 1976, accordant 80% de son territoire au Maroc et 20% à la Mauritanie, sans consulter les Sahraouis. En 1979, la Mauritanie leur cède sa part du Sahara. Depuis lors sévit un conflit diplomatique, politique, économique et militaire entre les Marocains et le Front Polisario. Les premiers ont annexé en 1979 la zone correspondant au Sahara occidental et l’administrent de fait. Les seconds veulent leur indépendance afin de créer la République arabe sahraouie démocratique (RASD).
En 1991, un cessez-le-feu, favorisé par la médiation de l'ONU, a été conclu, mais l'affaire n'est pas réglée pour autant. L’Organisation des Nations Unies, représentée par la mission MINURSO dans la région depuis 1991, se pose en garant de la paix, dans l'attente d'un référendum sur l'autodétermination qui tarde à venir. Actuellement, Dakhla est la capitale de la province marocaine Oued Ed Dahab Lagouira.
Ce litige territorial n'empêche pas, depuis 2008, le flux croissant de touristes qui viennent succomber aux charmes de Dakhla. Camping-caristes et kitesurfers occupent saisonnièrement la baie et profitent de ses vents doux et tempérés en hiver. Les surfeurs, eux, se frottent aux vagues de sa façade atlantique (voir Nomadiser à Dakhla : mode d’emploi).
La baie de Dakhla est fascinante. Un air de bout du monde, de bulle vierge. Le matin elle s’éveille nimbée de brume légère. Le continent distant d’une poignée de kilomètres apparaît peu à peu, immobile, minéral. Le Sahara. À l’abri des courroux arides, sur la péninsule, le voyageur frissonne. Aujourd’hui, le vent vient de l’ouest, les alizés sont frais. Hier, le chaud sirocco d’est régnait. Le voyageur l’a vite compris. Oui, la baie de Dakhla est soumise aux vents. Voilà les véritables maîtres ici.
Les kitesurfeurs, qui investissent la baie de fin février à fin octobre, sont encore couchés. La baie, à marée basse, appartient aux matinaux, aux marcheurs, aux rêveurs… et aux pêcheurs. En son sein sommeille l’île Herné, appelée « l’île du dragon », en raison de sa forme. Une île mystérieuse, bordée de plages cachées et de prairies sous-marines, accessibles seulement à marée basse. Le reste de la journée, elle est encerclée des eaux de la baie.
Son meilleur profil est visible au PK25. Le Point Kilométrique 25, en version longue, se situe à l’entrée de la péninsule du Rio de Oro. Une institution, pour les camping-caristes, dont une centaine y élit résidence pour l’hiver. La valeur du spot réside dans le point d’eau chaude et sulfureuse. Douche délicieuse garantie. Le PK25 est également connu des kitesurfeurs. Vents garantis, aussi.
Dépassé le centre-ville, les distances s’allongent vite. Comptez 10 km pour rejoindre Westpoint ou la plage d’Oum Labouir. Réputé internationalement, le spot de surf situé sur la façade atlantique est accessible en voiture. Oum Labouir offre un contrepoint électrique, sauvage à la baie paisible. Comptez également une dizaine de kilomètres pour rejoindre la pointe sud de la péninsule, Lassarga, le village des pêcheurs également connu des surfeurs pour sa vague.
Sur la route du Sud, le voyageur pourra tenter de se perdre dans une lointaine excursion vers les plages infinies de Puerto Rico à 80 km au sud de Dakhla. C’est là qu’il atteindra le point de non-retour, son ultime bivouac, isolé et désertique, sur la route du Sud et de la Mauritanie … Là où le Sahara reprend ses droits.
Fiche pratique
Comment y aller ?
En avion, un vol direct Paris-Dakhla a été annoncé par Royal Air Maroc en 2021. Sinon, avec une correspondance à Casablanca il est possible de rejoindre Dakhla au départ de la France, notamment de Lyon, Paris et Bordeaux. Trouvez votre billet d’avion.
Par la route, c’est tout droit. Sur la nationale 1, dépassez Agadir, puis Lâayoune, enfin Dakhla. Route en parfait état, chaussée large, revêtement neuf. Un plaisir de route, falaises, dunes, désert.
Où dormir ?
- Dakhla Attitude. Le camp emblématique de Dakhla, le pionnier. Bungalows bleu majorelle et bar de plage. À partir de 80 € par nuit en pension complète (comme tous les hôtels de la région) en basse saison (novembre-février).
- Westpoint. Situé du côté de l'océan Atlantique, l'hôtel est principalement connu pour son spot de surf. À partir de 100 €.
- Hotel Doum : avenue Al Walaa, Hey moulay rachid. Sans grand charme. Son atout : un bar.
Où manger ?
- Villa Dakhla : avenue Mohammed V, Dakhla, restaurant. Jocelyne,65 ans, vous accueille et propose une cuisine aux accents méridionaux. À tester : le parmentier de dromadaire !
- Chez Ntifi : boulevard Ahmed Ben Chekroun. On y mange le couscous le vendredi, accompagné de petit lait. Et c’est bon. 30 dirhams.
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