Le gouvernement saoudien veut transformer une cinquantaine d’îlots isolés de la mer Rouge en zone touristique de luxe.
Sur le papier, le projet paraît délirant. Mais après tout, dans les pays du Golfe gorgés de pétrole, les projets les plus fous peuvent aboutir. Dubaï a bien construit le gratte-ciel le plus haut du monde (828 m) et les résidences de luxe sur des îles artificielles en forme de palmier. Cette fois, c’est l’Arabie saoudite qui sort de ses cartons un projet touristique de luxe sur une zone grande comme… la Bretagne.
Pour son pharaonique projet touristique sur la mer Rouge, l’Arabie saoudite s’est en partie inspirée de l’île artificielle en forme de palmier construite aux Émirats arabes unis. |
L’idée, urbaniser une cinquantaine d’îlots isolés de la mer Rouge, répartis le long de 150 km de la côte ouest du pays, entre Umm Lajj et al-Wajh. La première phase du projet prévoit la construction, à partir de 2019, d’un aéroport, d’hôtels et de résidences 5 étoiles. Les premiers touristes sont attendus dans cinq ans.
Récifs coralliens et anciens volcans
Les promoteurs vantent la beauté du site, ses récifs coralliens, ses anciens volcans et une réserve naturelle habitée par des espèces sauvages rares comme les léopards arabes et les faucons. Sans oublier la proximité, en face sur le continent des ruines de l’antique cité nabatéenne de Madain Saleh.
Les promoteurs vantent la beauté du site, ses récifs coralliens, ses anciens volcans et une réserve naturelle habitée par des espèces sauvages rares. |
Pas d’estimation du coût pour le moment. Mais le pilote du projet, le fonds public d’investissement, qui dépend du gouvernement, a les poches pleines. Surtout il a l’aval du prince héritier Mohamed ben Salmane, 31 ans, l’étoile montante du pays.
Le pilote du projet a l’aval du prince héritier Mohamed ben Salmane, 31 ans, qui prend peu à peu le contrôle du pays.
Fils du vieux roi Salmane, celui qu’on surnomme MBS prend peu à peu le contrôle du pays. Ministre de la Défense, il supervise la guerre que l’Arabie mène au Yémen voisin contre les rebelles chiites. Président du Conseil des affaires économiques et du développement, il a fait sensation l’an dernier avec son plan baptisé Vision 2030. Il a l’ambition, rien moins que de sortir l’Arabie de sa dépendance au pétrole, qui représente plus de la moitié du PIB.
Vision 2030 veut réduire la part d’un secteur public pléthorique, développer l’industrie et, donc, le tourisme. Après tout, l’Arabie saoudite ne possède-t-elle pas des centaines de kilomètres de côtes vierges et un climat idéal, au moins en hiver pour attirer une large clientèle occidentale et asiatique ?
35 000 emplois, 4 milliards d'euros par an
La vidéo de présentation du projet est édifiante : « Cette exquise destination touristique de luxe, avec des îles, de la nature et de la culture, doit établir une nouvelle norme pour le développement durable mondial et positionner le Royaume sur la carte du tourisme mondial. » Rien que ça ! Le gouvernement espère attirer 1 million de visiteurs par an d’ici 2035. Le projet doit créer jusqu’à 35 000 emplois et générer l’équivalent de 4 milliards d’euros par an.
Contourner les interdits de l’islam wahhabite
Mais il y a un gros souci. Comment faire venir des touristes dans un pays où l’islam fondamentaliste wahhabite est religion d’État, où l’alcool, les discothèques, les cinémas sont interdits, où les femmes musulmanes sont obligées de se voiler et les étrangères tenues de porter l’abaya, une longue robe couvrante ? Justement, le projet de zone touristique sur des îles permet de résoudre cette contradiction.
Isolée, la zone devrait bénéficier d’un statut de semi-autonomie, avec une facilité d’accès notamment pour les visas, très difficiles à obtenir aujourd’hui. Et on peut facilement imaginer qu’on pourra y danser, s’y baigner, y boire de l’alcool, même sans modération. Sans que les idéologues de l’islam wahhabite y trouvent à redire…
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