Le village montagneux et isolé de Sagada (11 244 âmes), situé sur l'île de Luçon dans le nord des Philippines, est connu pour ses "cercueils suspendus". Au cœur de la région de la Cordillère, entre montagnes et rizières en terrasse baignées par la brume, des centaines de cercueils en bois se balancent à flanc de falaises, se fondant dans un décor de forêts de pins, de grottes et de cascades. Il s'agit d'un rite funéraire local centenaire inspiré de l'animisme, mais qui tend à disparaître à cause de l'influence du christianisme. Le dernier défunt y a été déposé en 2010.
Si de nombreuses théories divergent pour expliquer pourquoi les peuples locaux suspendaient ainsi leurs morts, la raison la plus souvent invoquée est celle de la proximité avec le Paradis. En effet, en hissant un défunt dans les airs, les communautés pensaient que son âme atteindrait plus rapidement le Paradis qu'en enfouissant son corps sous terre. Une belle métaphore qui demande néanmoins une logistique un peu plus exigeante qu'un enterrement classique.
En effet, pour élever de la sorte des cercueils, parfois à plusieurs dizaines de mètres de hauteur, les habitants de Sagada utilisaient un système de cordes et de poulies. Les cercueils étaient ensuite déposés sur des pieux enfoncés dans la roche calcaire. On note que la plupart des sarcophages en pin sont de petite taille, non pas parce qu'ils abritent des dépouilles d'enfants, mais parce que selon la tradition initiale, les morts étaient placés en position fœtale afin de repartir de ce monde dans la même position que celle dans laquelle ils y étaient arrivés.
Néanmoins, avec les années qui passent, les cercueils en bois ne résistent pas toujours aux intempéries de la saison des pluies et finissent par tomber dans la vallée. Une fois à terre, ils ne sont jamais remis en place. Aussi, de moins en moins de cercueils sont hissés et de plus en plus sont détruits pendant la mousson, condamnant probablement cette tradition à disparaître sans laisser de traces. Mais non loin de l'Echo Valley où les cercueils sont suspendus, demeurent des grottes où les anciens cachaient leurs morts quand ils n'avaient pas le temps de les enterrer. Entre les lattes de bois qui s'effritent, on aperçoit toujours les corps.
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